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Yuka : l'application qui change nos habitudes alimentaires

05.12.2021

Les crises sanitaires et les enjeux environnementaux ne cessent de nous interroger sur notre manière de nous nourrir et de produire. L’application Yuka ambitionne de faire de nous des consomm’acteurs…

Se nourrir, prendre soin de son corps, mieux consommer de manière générale sont devenus des préoccupations essentielles pour de plus en plus de gens. Dans ce sens, plusieurs applications mobiles ont été créées dans le but d’éclairer nos choix. Yuka est l’une d’entre elles.

Son succès auprès des consommateurs est tel que son influence a fini par toucher les secteurs de l’agroalimentaire et de la grande distribution. Pour ne pas perdre en attractivité auprès de leurs clients, les entreprises sont contraintes d’apporter des réponses en améliorant leurs produits. Mais quelle est l’étendue de cette influence ?

Yuka, qu’est-ce que c’est ?

La société Yuka SAS tire son nom d’un État du sud du Mexique, Yucatán - le pays d’origine de l’épouse d’un des trois fondateurs : Julie Chapon, François et Benoît Martin. C’est en 2017 que ces 3 français lancent cette entreprise qui revendique aujourd’hui 21 millions d’utilisateurs. Sa spécialité ? L’évaluation des produits de consommation !

Comment ça marche ? L’application utilise une nomenclature minimaliste pour simplifier sa prise en main par le consommateur. Chaque produit peut être scanné directement par le consommateur en pointant l’appareil photo de son téléphone sur son code barre. Le produit se voit alors assigner un code couleur suivant sa qualité. Plus le score est élevé, plus le produit est censé être bon : vert foncé signifie «excellent», vert clair «bon», orange «médiocre» et rouge, «mauvais».

Pour être plus précis, la notation s’étend à trois critères :
60 % du score est déterminé par la qualité nutritionnelle. Elle est calculée sur la méthode de calcul du nutri-score (guide de comparaison des produits selon leur catégorie) développée par le ministère de la Santé. La teneur en énergie, en sel, en sucre ou en gras sont autant de variables prises en compte.
Ensuite, 30% représente la présence d’additifs.
Enfin, 10 % évaluent la qualité biologique selon le label bio européen.

Si le score d’un produit est mauvais, Yuka va jusqu’à rediriger son utilisateur vers un produit semblable, censé être meilleur et disponible dans le commerce. Pour résumer, Yuka permet en un scan de connaître la qualité de nos produits alimentaires, et nous offre ainsi la possibilité d’orienter facilement nos choix de consommation suivant des critères objectifs.

Un succès incontestable

Le succès est clairement au rendez-vous. Il suffit de voir à quel point l’application est entrée dans les mœurs. Le verbe «Yukaïser» a même fait son apparition dans certains foyers. Aujourd’hui, dans les rayons des magasins, pour vérifier la qualité d’une sauce, de gâteaux ou d’un jus de fruit, le consommateur sort son smartphone et scanne son code-barre.

On peut se demander à quoi tient réellement le succès de cette application ? De fait, elle s’impose parmi plusieurs autres : Is my food good, Verdict ou encore Kwalito qui se démarque en proposant de scanner notre nourriture en fonction d’un régime alimentaire particulier… La qualité de son algorithme y est certainement pour quelque chose. Tout en s’appuyant sur la plateforme collaborative Open Food facts (sorte de dictionnaire qui classifie les produits en fonction de leur degré de transformation), elle crée en 2018 sa propre base de données alimentée par ses utilisateurs et les industriels. En 2020,1 million et demi de produits sont ainsi recensés sur la plateforme.

Toutefois, l’influence de Yuka apparaît au demeurant essentiellement limitée à certaines catégories de Français : ceux qui font «attention à leur santé» et à «leur impact environnemental». L’utilisation de l’application, précise l’étude de l’ObSoCO (Observatoire Société & consommation), est plutôt le fait de personnes jeunes (29% de 25-34 ans contre 9% de 65 ans), urbaines (25% de Franciliens) et diplômées (29% de bac +5). Il convient aussi de noter, en reprenant Caroline Urbain de l’IAE de Nantes, que le pouvoir d’achat a aussi son importance : « Le pouvoir d’achat pèse également beaucoup sur le pouvoir du consommateur… »

Yuka, quelle influence ?

Initialement, les créateurs affichaient un double objectif,

Premièrement, ils souhaitaient donner aux consommateurs les moyens de connaître la qualité d’un produit sans avoir à déchiffrer des emballages peu lisibles. La société s’affiche indépendante et annonce que ses scores reposent sur une expertise scientifique reconnue : l’ANSES (l’Agence nationale de sécurité sanitaire), la CosmeticOSC (l’Observatoire des cosmétiques), la liste Sin, liste de substances chimiques dangereuses à supprimer… Tous les ingrédients seraient passés aux cribles pour attribuer aux aliments un niveau de risque en fonction des effets avérés ou suspectés sur la santé (perturbateurs endocriniens, éléments cancérigènes, allergènes…).

L’intérêt que l’application a rapidement suscité (dès 2018) a conduit par la suite à proposer une nouvelle fonctionnalité : l’analyse des produits cosmétiques et des produits d’hygiène.

Ensuite, poussé par des consommateurs de plus en plus informés et exigeants, Yuka vise à inciter les industriels à améliorer la qualité de leurs produits, tant pour la santé des individus que pour la planète. De quoi étendre l’impact de la vocation première de l’application, à mi-chemin entre la pédagogie et l’engagement militant : guider nos achats afin de faire de nous des " consomm’acteurs”, et privilégier in fine les entreprises et producteurs soucieux de la santé humaine et de l’environnement.

Les chiffres tendent à prouver que Yuka aurait visé juste. Si l’on s’en tient à une étude d’impact de septembre 2019 portant sur 230 000 utilisateurs et 21 industriels, il ressort que :

  • 92 % des utilisateurs reposent dans les rayons les produits mal classés.
  • 83 % des utilisateurs disent acheter moins mais de meilleure qualité.
  • 84 % privilégient les produits bruts et 78 % les produits biologiques.

On apprend dans le même temps que 90 % des sondés sont convaincus que Yuka est en mesure de peser sur les industriels afin de les inciter àaméliorer leurs produits. Les 21 entreprises interrogées n’ont pas manqué de témoigner de cette influence. On peut citer Nestlé France, Monoprix, Leclerc, Fleury Michon… Pour citer un exemple significatif, Intermarché a annoncé le changement de 900 recettes de produits pour les rendre plus sains et améliorer leur note sur l’application.

De multiples scandales sanitaires liés à notre alimentation (tels que celui de la «vache folle», la présence de viande de cheval dans les lasagnes…) ont créé de la défiance vis-à-vis du secteur agro-alimentaire et de la grande distribution. Les consommateurs ont été amenés à se soucier davantage de leur alimentation pour préserver leur santé. La multiplication des manifestations de la crise climatique a aussi contribué à accélérer la prise de conscience quant à la nécessité d’une transition écologique. Yuka s’est, semble-t-il, d’abord développée par la compréhension de ces besoins.

L’intégration d’un nouvel indicateur sur l’application renforce cette idée : l’éco-score, une des propositions phare de la Convention Citoyenne Pour le Climat, alimenté par la base de données Agribalyse conçue par l’ADEME et l’INRAE. L’éco-score intégré par Yuka s’appuie ainsi sur l’analyse du cycle de vie, mesurant les effets globaux des produits alimentaires sur l’environnement, de leur culture à leur recyclage en passant par leur transformation et leur transport.

Ainsi, depuis février 2012, à chaque scan, un score écologique apparaît en même temps que les qualités nutritives du produit, avec une une note allant de A à E. Vers le A, l’impact environnemental du produit est jugé limité, et inversement lorsqu’on se rapproche du E, l’effet sur l’environnement est jugé néfaste.

L’influence et l’impact de l’application Yuka sont incontestables : elle permet de favoriser l’émergence d’une consommation plus durable, respectueuse de la santé et de l’environnement. Néanmoins, elle reste encore circonscrite à une partie de la population et des acteurs industriels : il faut certainement laisser le temps faire son œuvre. Tout changement dans nos habitudes n’est-il pas avant tout l’œuvre de chaque conscience personnelle confrontée aux problèmes de son temps ?

Aller plus loin

  • Pour acheter plus responsable, rendez-vous sur le site Bien ou bien, qui vous orientera vers des produits bons pour les gens et pour l’environnement !
  • La plateforme Moralscore (site et application mobile) vous permet de sélectionner des marques en fonction de vos critères éthiques (dont l’impact environnemental), suivant un système de notation. Et cela vaut notamment pour les objets numériques !

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Pour repenser l’impact de vos activités numérique sur l’environnement, consultez Reboot : un guide complet pour vous aider à y voir plus clair et à agir en faveur d’un numérique plus durable, respectueux de notre planète !

Face à l’urgence climatique, il est encore temps de changer de logiciel. Ensemble, faisons le choix d’un numérique éco-responsable.

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