Guerre en Ukraine : la désinformation pour arme
Lives Tik Tok diffusant bruits de sirènes et pleurs, vidéos de missiles falsifiées…la guerre en Ukraine est un triste phénomène viral. Avec, parmi les armes de guerre, la désinformation au service de la manipulation de l’opinion.
“L’art suprême de la guerre consiste à soumettre l’ennemi sans combattre” disait Sun Tzu au Ve siècle av. J.C. Comment ? En cherchant à atteindre la psychologie de ses adversaires, et à influencer les opinions. Pour y parvenir, militaires et stratèges ont recours à la désinformation en tant que technique de manipulation. La triste actualité du conflit russo-ukrainien nous donne une nouvelle illustration d’une guerre hybride, qui se joue aussi dans le cyberespace.
La désinformation s’appuie sur l’utilisation de techniques d’information de masse destinée à induire en erreur, cacher ou déformer des faits. Elle peut intervenir en temps de paix comme en temps de guerre. Avec Internet et les réseaux sociaux, la résonance et la vitesse de circulation est décuplée, favorisant aussi l’impact potentiel et la multiplication de fake news visant à influencer l’opinion publique.
Faisons le point sur quatre illustrations des techniques employées et objectifs recherchés par les auteurs de ces fake news.
Brouiller les sens du public et empêcher la distinction entre vrai et faux
La désinformation s’appuie sur la pratique de la surinformation, qui cherche à brouiller notre perception et notre capacité à analyser une information qui nous parvient.
L’afflux de fake news vise ainsi généralement à court-circuiter la communication émanant des autorités officielles en misant sur des contenus à forte valeur émotionnelle.
Grands titres alarmistes et laconiques, bandeaux TV trafiqués, vidéos antidatées ou encore photos détournées, les infox déferlent sur les réseaux sociaux depuis le commencement du conflit en Ukraine. L’objectif ? Choquer, provoquer une réaction émotionnelle, et in fine, limiter notre capacité à raisonner et à identifier la vérité.
Un exemple de ce type de manipulation : là où les spectateurs pensent voir la vidéo de tirs de missiles sur Kiev en 2022, il s’agit en réalité d’une archive provenant de Gaza en 2021.
Isoler le gouvernement de ses alliés et le dénoncer auprès de ses concitoyens
L’émetteur de la désinformation vise le plus souvent à parasiter la relation de confiance tissée entre un dirigeant, ses partenaires et ses concitoyens.
Si l’objectif est atteint, le chef d’Etat peut se retrouver isolé, soumis à un climat de défiance de plus en plus généralisé, et perdre en influence du fait de la désunion de sa communauté nationale.
La campagne de désinformation menée en ligne par la Russie a démarré bien en amont du conflit armé dont souffre aujourd’hui le peuple ukrainien. Dès 2013, alors que l’Ukraine renforçait sa coopération avec l’Union européenne, Moscou a massivement inondé le web social de rumeurs visant des prétendues activités militantes néo-nazies menées par le gouvernement ukrainien, accusé en outre de s’être rendu coupable d’attaques contre les minorités des pays voisins.
L’image falsifiée d’un petit garçon de Slaviansk crucifié par l’armée ukrainienne dans le Donbass, placardée sur toutes les plateformes virtuelles et diffusée sur Pervyi Kanal, première chaîne nationale russe avait prouvé, il y a 7 ans de celà, que la propagande gagnait du crédit dans les temps modernes. Bien que rapidement critiquée pour son absence de crédibilité et de déontologie, et dénoncée par la presse internationale comme un exemple de désinformation et de propagande de guerre, l’image avait révolté les foules d’Internet.
Générer des conflits internes pour mieux régner
Les fake news jouent sur un contexte sociopolitique donné et cherchent à diviser par tous les moyens. Les infox fleurissent notamment au sein de communautés radicales très engagées sur les médias sociaux, qui visent à exacerber des tensions nationalistes, ethniques, religieuses pour cliver les citoyens. Ainsi, de nombreuses fausses informations circulent en exploitant rumeurs et opinions de nature à creuser un fossé idéologique croissant entre Ukrainiens et Russes vivant en Ukraine.
Désolidariser la communauté internationale de l’Ukraine serait également l’un des objectifs poursuivis par les propagateurs de fausses informations sur le conflit. Des opérations ciblées sur les scrutins électoraux en France, comme ce fut le cas en 2016 aux Etats-Unis, pourraient à nouveau survenir, et chercher à favoriser les candidats favorables à la cause défendue par le camp pro-russe.
La défiance et la critique pour faire obstacle à l’infox
Pour faire face à ces nombreuses tentatives de manipulation de l’opinion qui prospèrent en ligne et sur les réseaux sociaux, Meta, nouvellement Facebook, et Twitter ont ouvert des cellules spéciales de lutte contre la désinformation.
Meta dirige ainsi un centre d’opérations spéciales pour l’Ukraine, visant à détecter au plus vite les contenus haineux, violents ou manipulateurs.
Mais l’utilisateur averti demeure le premier rempart aux troubles recherchés, et le premier garant de la vérification de la vérité des faits. Lire les commentaires des contenus, se méfier des grands titres accrocheurs, multiplier et diversifier les sources d’information sont le b.a.-ba de la lutte contre la désinformation.
Pour en savoir plus sur les origines de la désinformation sur internet, et adopter de bonnes pratiques pour s’informer en ligne, nous vous invitons à consulter notre parcours dédié ! Et en bonus, plongez dans la controverse anti-vaccins avec notre étude “Étude - Infox : nouvelle épidémie du web”.
Comment lutter contre les fake news et adopter de bonnes pratiques ?
Introduction
Dans une société où internet a multiplié les moyens de communication et d’information, chaque citoyen doit être en mesure de se forger une opinion éclairée. La maîtrise d’une culture hybride, mêlant le fonctionnement de la presse à celui du numérique, est alors essentielle. Avec à la clé, la capacité à se protéger contre les infox, ces fausses nouvelles qui prospèrent sur internet, et aboutissent à créer une véritable fracture de l’information parmi la population.
Etape 1 : s’informer sur… les origines de la désinformation sur internet
Ah, les “fake news” (fausses informations) ou “infox” ! Vous avez sûrement l’impression d’en avoir largement entendu parler. Avant de rentrer dans le vif du sujet, il convient de prendre un peu de recul et de faire l’état des lieux des pratiques des Français en matière d’information… Nous vous proposons ici de partir en quête des origines de la désinformation qui semble toucher, via le web et les réseaux sociaux, un nombre conséquent de personnes !
Etat des lieux : comment les Français s’informent-ils à l’ère numérique ?
Comment identifier une fake news ?
“Fake news” est un anglicisme désignant une fausse nouvelle, une information bidon. On l’appelle aussi “infox” ou “information fallacieuse”. Souvent diffusées sur Internet - ou parfois en utilisant d’autres médias - elles sont généralement créées pour influencer l’opinion politique des internautes ou simplement pour leur faire des blagues. La particularité des fake news ? C’est de sembler vraie. Avec l’usage généralisé des réseaux sociaux et la multiplication des sites d’information, certaines actualités sensationnelles sont reprises par des milliers de personnes, sans pour autant que l’information n’ait été vérifiée. C’est pourquoi il est important de savoir débusquer les fausses nouvelles pour ne pas se laisser piéger ! Voici quelques règles à suivre.
Soyez attentif aux titres et aux messages qui accompagnent un contenu
Pour interpeller un maximum de lecteurs, les fausses informations adoptent souvent des titres racoleurs et accrocheurs. S’il est écrit en majuscules ou contient des points d’exclamation, il peut s’agir d’une fausse actualité. De plus, certains messages tels que « Faites tourner », « Diffusez à tous vos contacts » ou encore « Les médias n’en parlent pas » peuvent alerter.
Vérifiez la crédibilité du site
S’agit-il d’un site d’information reconnu ? Une simple recherche sur Internet peut suffire pour vous renseigner sur la ligne éditoriale et la réputation du site en question. Vérifiez également l’URL : il arrive que certains sites frauduleux imitent l’adresse de véritables médias.
Remontez à la source
Qui a pris la photo/vidéo ? Quand ? Comment ? Où ? Autant de questions nécessaires pour tracer la source d’un contenu. Si le contexte semble vague, ou que les personnes citées ne sont pas précisément identifiées, cela doit éveiller la méfiance. Attention également aux témoins indirects, qui n’ont pas assisté à l’événement.
Regarder les commentaires sous la publication d’un contenu pour en ressortir les réactions majoritaires…
Mais attention, en aucun cas cela ne constitue une preuve. De la même façon, un nombre élevé de partages et de vues sur une publication ne constitue pas un gage de fiabilité d’une information.
Décryptez les images et les vidéos
Grâce à certains outils informatiques, il est désormais aisé de vérifier la provenance d’une photo ou d’une vidéo. Des annuaires inversés d’images et de vidéos existent pour confronter votre contenu à des contenus ressemblants et vous aider à tracer la source réelle de l’information. Avec Google Images ou Tineye, il suffit de glisser la photo pour connaître sa source. En un clic, l’outil peut retrouver la photo originale. Il est ainsi possible de connaître la date de sa publication, et de découvrir si elle a été retouchée. Quant à l’authenticité des vidéos, elle peut être vérifiée grâce à YouTube DataViewer, un site mis en ligne par Amnesty International qui permet de savoir quand, et par qui une vidéo a été publiée.
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Une simple recherche peut prouver l’authenticité d’une information. En général, si d’autres sites évoquent cette actualité, en citant les mêmes sources, il est probable qu’elle soit vraie.
En revanche, si aucun média de référence, francophone ou étranger, ne la mentionne, il peut s’agir dans ce cas d’une fake news.
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